Politique : Le Bûcher des Vanités

 Hôtel de Matignon.
 

La référence au célèbre roman de Tom Wolfe n’est pas anodine car celui-ci dissèque avec le talent du romancier les affres et obstacles comparables à ce que vit le monde politique d’aujourd’hui : le pouvoir, la politique et les médias, l’argent, la justice, le courage et la lâcheté. Il est bien des domaines où ces éléments descriptifs s’agitent, mais il faut bien reconnaître que du sommet de l’Etat aux députés, en passant par les états-majors des partis politiques et des syndicats, tous ces ingrédients nous sautent à la figure à chaque « fil d’infos » que nous consultons. Tom Wolfe évoquait Wall Street, mais au fond, il semble qu’on passe du Capitole à la roche Tarpéienne aussi bien en bourse qu’en politique. Les temps concentrent aujourd’hui ce que nous devrons corriger d’urgence. 74% des Français ne font pas confiance aux élites politiques (Cevipof fev 2025). Les événements récents n’ont pas dû arranger ce chiffre.

Petit monde : L’essentiel des thèmes abordés par la politique à ce jour concernent « le Budget ». On comprend pourquoi : la dette, les investisseurs, l’avenir social, la démographie. Mais que s’est-il passé pour qu’un budget, censé être le résultat de projets et d’espoirs devienne « Le Projet » ? Quand le sujet unique est la peur de manquer, les français épargnent, et quand ils épargnent l’économie s’affaiblit. Un malade assis sur un tas d’or est l’image d’un petit monde. (Le taux d’épargne des français a doublé depuis 2019, avec un en-cours de plus de 80 milliards d’€).

Justice : Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen sont confrontés aux décisions de justice. Le débat est lancé sur les « exécutions provisoires ». Un ex-Président de la République entre ce 21 octobre 2025 en prison et la principale opposante politique ne peut se présenter aux élections quelles qu’elles soient en attendant son procès en appel. Les deux faits judiciaires rappellent au public l’égalité citoyenne face au droit et globalement face aux lois. Cela tombe assez mal, car l’image de la France n’a pas besoin de cela, mais c’est aussi un rappel à l’ordre, dans son sens premier. Les deux procès en appel décideront de la justesse ou de l’iniquité de ces exécutions provisoires. Au moins, quelque chose fonctionne même si ce bûcher est un peu vif.

Diamants : Au moment où Rachida Dati, ministre de la Culture ayant survécu aux gouvernements successifs, se voit sous enquête pour une potentielle dissimulation de bijoux pour une valeur de plus de 400 000 €, la catastrophe arrive : le Louvre est dévalisé ce 19 octobre, en plein jour, comme dans un film de casse des années 80. Les dieux sont joueurs car Madame Dati a justement la responsabilité ultime des objets et monuments classés, représentant notre histoire et richesse nationale. Elle n’est pas seule en cause mais avouons que ce rocambolesque cambriolage démontre bien que les emmerdes volent toujours en escadrille (citation de J. Chirac). Le bûcher de la politique brûle aussi sur des diamants ces temps-ci.

Les premiers seront les derniers : Edouard Philippe, Jean Castex, Elisabeth Borne, Gabriel Attal, Michel Barnier, François Bayrou. Les reniements ministériels suivent les remaniements, et l’humain reprend le dessus quand on réclame le départ du Président, qu’on ne comprend plus ses décisions, qu’on accepte une suspension de la réforme des retraites après avoir défendu cette réforme bec et ongles, ou qu’on découvre le mot « boomers » pour y loger la culpabilité des retraités… Ils-elles se reconnaîtront. Les ambitions et la trahison, l’abandon par lassitude, quelle épingle à tirer dans quel jeu, sont les questions du jour. La politique pouvait être amusante parfois à observer, et les français n’ont jamais refusé de sourire aux bons mots de J. Chirac ou aux envolées plus lointaines mais savoureuses de G. Marchais. Ils s’en détournent aujourd’hui, en attendant une catastrophe plus qu’une éclaircie pour leur quotidien. Ils n’ont même plus les bons mots.

Les solitudes : E. Macron est isolé sur l’échiquier. Il ne peut s’en prendre qu’à lui-même et il tente de trouver refuge sur les sujets internationaux. Mais il n’est pas le seul à se rapprocher de l’ombre. J.L. Mélenchon et M. Le Pen, paradoxalement, sont également isolés. L’un par la fuite des socialistes mettant en péril son dernier tour de piste, et l’autre par un rétrécissement de ses chances 2027 dans l’affaire des assistants parlementaires. Un temps crépusculaire précède toujours un renouveau mais en attendant, certaines pages d’histoires sont bien lourdes à tourner.

Avenir : 68% des Français font confiance aux élus locaux. Les entrepreneurs, pour peu qu’on stabilise le champ politique, sont prêts à investir. La France, malgré ce chaos politique, reste attractive et les français n’attendent qu’un vrai projet pour avancer.

La démocratie vit de cela.

Les vanités des sommets n’y sont pas les bienvenues.

Note de l’auteur

Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques , mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.

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