Europe vs États-Unis : Vers la non-dépendance

 ©Weyo/AdobeStock.


Nouvelle donne : Le récent retour au pouvoir de Donald Trump, qui sera effectif à partir de janvier 2025, ne pose aujourd’hui qu’une somme d’inquiétudes pour l’Europe. C’est en soi légitime, au regard de la violence de cette campagne électorale américaine et des propos et actions qui ont été relayés dans les médias du monde entier. Le « Trumpisme » est un écho populaire « à l’américaine » de la montée des droites dures en Europe et dans le monde. L’esprit démocratique ne peut pas lutter contre les fins de mois difficiles ou l’inflation subie par les classes moyennes populaires. Cette élection en est l’exemple type. Cela peut être ressenti comme un clou supplémentaire sur le cercueil de la démocratie, ou une claque désagréable, mais cela peut être aussi salutaire pour un renfort européen à construire. Le premier mandat de D. Trump aurait pu suffire mais le retour aux affaires des démocrates (J. Biden) a laissé penser que les alliances d’après-guerre étaient encore solides. Et l’Europe s’est un peu endormie là-dessus.

Poids de l’Europe : Nous savons tous que le XXIᵉ siècle géopolitique ne brille pas par sa stabilité. L’Europe a donc des atouts existants et d’autres à construire pour ne pas être victime de l’agitation guerrière et économique. L’indépendance totale est impossible dans ce monde où commerce et conflits cohabitent. La non-dépendance, par contre, est un objectif absolu à poursuivre et à atteindre car elle nous laisse quelques cartes en main au lieu de subir. L’Europe est au cœur de ce sujet, et les pays de l’U.E. auront des choix à faire : chaque nation pour soi ou tous pour l’Europe. L’infographie ci-dessous (FMI, STATISTA) montre la forme unifiée des poids économiques relatifs des principales puissances, avec une prévision 2024. La même image avec chaque pays européen « désuni » démontrerait une addition de faiblesses, et non une part stratégique de l’activité mondiale, à l’instar du Royaume-Uni absent sur cette carte.


Statut de l’Europe : Dans ce moment d’intense observation des décisions futures américaines, l’Union européenne pourrait souffrir de ce qui a fait son succès : son statut. En effet, c’est une organisation unique, sans être une fédération, ni une confédération d’États, ni une organisation internationale. Le traité de Lisbonne en est la base juridique mais le poids réel de l’U.E. face aux géants mondiaux n’aurait de sens, et donc de puissance, que dans une forme monolithique au sens économique et surtout politique. Cela impliquerait une gouvernance unique et une attribution budgétaire globale en fonction des mouvements du monde : en un mot, en faire les États-Unis d’Europe ou quelque chose d’approchant. Aujourd’hui, aucun pays de l’U.E. ne souscrit à cette hypothèse, le principe de souveraineté des nations étant à la base des accords fondateurs. La solution réside donc dans une coordination absolue des moyens et un partage des objectifs, ce qui pourrait donner lieu à une forme d’État Major de Défense Européenne, incluant la force nucléaire, et en parallèle de cela une stratégie économique intégrée de manière à équilibrer les marchés. La Banque centrale européenne, indépendante des pouvoirs politiques, joue son rôle mais ne coordonne pas de stratégie économique, à ce stade. Il faut imaginer une structure stratégique, et non seulement de gestion financière et de contrôle.

Espoir européen : La « Non-dépendance » de l’Europe, bien que le terme ne fasse pas rêver, est pourtant un espoir de poursuite du projet européen dans ce qu’il a d’humaniste et de démocratique. Nous avons été témoins de la vitesse avec laquelle le Kremlin a contourné les sanctions occidentales en construisant de nouvelles alliances économiques et militaires. Leur exemple n’est pas politique et encore moins moral, bien sûr, mais démontre que la porosité des frontières commerciales autorise la recherche de nouveaux partenaires, et de nouvelles organisations lorsqu’un « associé » commence à faire défaut. Les États-Unis ont une puissance qu’on ne peut ignorer, et avec laquelle il faut continuer à travailler mais il y a des plans « B » car de nombreux pays souhaitent aussi traiter avec l’U.E. Il se pourrait bien que l’avenir de l’Europe passe par une « sur-mondialisation » des échanges pour compléter ce qui pourrait faire défaut, lors de ce deuxième mandat de D. Trump : une Union européenne doublée d’un réseau massif d’alliances inédites.

Garder le dialogue avec les États-Unis mais cesser la vassalisation par les moyens, et retrouver des choix.

Nul ne dit que ce sera facile,

Mais sans Europe unie, ce sera impossible.


Note de l’auteur

Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques, mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.

Laissez-nous un commentaire

Plus récente Plus ancienne