Démocratie : La désinformation en deux mots

 Conseil de Sécurité des Nations Unies

Par François Petitjean - Consultant et analyste de la communication politique, auteur de Adworld sur la publicité, Toxic sur les médias et Sine capita sur le numérique et l’IA aux éditions du Panthéon.

L’époque actuelle est propice à la désinformation. L’amplification numérique des communications diverses (social média), la multiplicité des émetteurs, et les complexités du monde favorisent cette activité. Dans ce contexte, la diffusion de fausses informations de manière intentionnelle, pour influencer l’opinion, reste la base de la communication des régimes autocratiques, et des partis extrémistes de nos démocraties occidentales.

Mais il existe une forme plus insidieuse de désinformation par les excès de langage ou simplement par la porosité qui peut exister entre les discours des dictatures et leur réemploi volontaire ou non par les citoyens occidentaux et parfois même par leurs élus.

I. Décivilisation

Ce n’est pas parce qu’Emmanuel Macron a employé une fois ce terme qu’il est d’un seul coup devenu honorable. Inventé par un sociologue allemand, Norbert Elias, il indique que certaines formes de violence sont le symptôme d’un recul civilisationnel. Dans les pas des « sauvageons » de J.P. Chevènement (1999), certains l’ont traduit par « ensauvagement » (G. Darmanin) avec un point commun qui est la mise en cause totale de la société et non d’un groupe plus ou moins identifié. Quand on parle des dealers, des trafiquants, de la mafia, des terroristes ou des banlieues, on cible une catégorie précise liée au crime. Quand on généralise une tendance, on cherche un coupable plus vaste : une religion, les immigrés, les pauvres, les chômeurs, etc…Et là, le discours devient politique et dangereux. Le terme de « décivilisation », mâtiné d’un « c’était mieux avant » est l’arme de communication principale de l’extrême droite de M. Le Pen et d’E. Zemmour dans une stratégie de diffusion de la nostalgie haineuse, ciblant des gens qui n’ont pas de rapport avec le crime. Et si on a une vision plus globale des choses, on se rend compte que ce terme est une soupe servie à V. Poutine qui n’a de cesse d’expliquer à tous ceux qui sont obligés de l’entendre, que notre civilisation occidentale est en perdition.

Se faire le relais de cette expression est une main tendue, même involontaire, à tous ceux qui souhaitent nous ramener à l’âge de pierre. Sans déni des problèmes réels d’aujourd’hui, les chiffres en France ne donnent pas raison à ce mot (Entre 2005 et 2020 le taux de crimes et délits pour 1000 habitants est passé de 70 à 58). C’est donc une désinformation latente, portée par une mode et un focus sur les agglomérations de Marseille et de Grenoble qui plombent la moyenne de la France.

San Pedro Sula (Honduras), Tijuana (Mexique), Caracas (Vénézuela), Salvador (Brésil), Rosario (Argentine), Johannesburg (Afrique du Sud), Alice Springs (Australie), Baltimore (Etats-Unis), Albuquerque (Etats-Unis) sont les villes les plus dangereuses du monde, pour celles dont on connait les statistiques.

Même Marseille est loin derrière.

II. Wokisme

A l’autre extrémité du prisme politique, et d’une manière tout aussi insidieuse, on trouve le wokisme. La simple lutte contre les discriminations de tous ordres (raciale, de genre, de culture, de religion), qu’on ne peut que louer, se transforme en une vision stalinienne de surveillance de la bien pensance. Le lien avec la désinformation c’est que ce type de militantisme d’extrême gauche envoie un message violent, ne prenant pas en compte la simplicité citoyenne qui anime de manière quasi immémoriale la société française. Par exemple, si on fait un micro-trottoir en demandant aux passants la signification de LGBTQIA+, on peut parier sur moins de 1% de réponses complètes, alors que nous aurions plus de 50% de ces personnes qui acceptent la différence de l’autre, quelle qu’elle soit. Il en va de même avec le nom des sept nains (il en manque toujours un), alors que tout le monde a vu Blanche Neige. A ce sujet, les wokistes ont certainement dû penser à changer le nom de ce dessin animé, le massacre culturel étant un objectif visiblement dans leurs cordes : la bonne intention pervertie par le radicalisme. Dans ce cas, la désinformation est la réécriture de l’Histoire, que ce soit par l’effacement des différences, ou par le simple souhait d’un effacement pur et simple de ce qui « n’aurait pas dû exister ». Brûler des livres, changer des noms de rues, et abattre des statues est l’exact schéma employé par les Talibans en Afghanistan, pour parler des plus récentes idioties totalitaires, Staline et Hitler devenant des références un peu trop employées ces temps-ci. La désinformation latente s’exprime ici par la volonté de modifier l’écriture du passé en croyant modeler l’avenir. Erreur sociologique majeure : c’est la nostalgie de l’Histoire qui peut être dangereuse pour la société, et non l’Histoire elle-même qui reste un socle.

IV. Les vrais infos
  • Les 3 pays les plus pauvres du monde sont le Burundi, la Sierra Leone, et le Malawi.
  • La Russie-Kremlin pense mener une guerre de civilisation. Plus de 200.000 morts à ce jour.
  • En 2048, la Palestine et Israël seront dans une guerre qui aura duré 100 ans.
  • L’Iran aura à terme l’arme nucléaire.
  • Daesh se reconstruit en Afrique
  • Le cartel Clan Del Golfo (Colombie) exporte 700 tonnes de cocaïne par an et emploie 3000 personnes. Il a fait 9 millions de victimes en un demi-siècle.
  • Dans 69 pays, l’homosexualité est interdite, et dans 12 d’entre eux elle est passible de la peine de mort. (Dernier en date : Ouganda)
Etc…

Alors on peut engager les Français en mal de discours sur la décivilisation et le wokisme d’aller porter ces bonnes paroles dans ces régions-là.

Car en France, ces approches n’ont aucun sens.

Espérons qu’elles n’aient aussi aucun avenir.

Note de l
’auteur

Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques, mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.

5 Commentaires

  1. Merci pour cette fine analyse qui prouve que la déconstruction du.monde de nos pères est un poison insidieux car elle joue sur les émotions et ignore la raison !

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  2. Vous lire ce matin , et voilà : je me sens moins seule. Merci d'avoir si bien résumé, si bien expliqué, ce que je n'aurais sur faire.

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    1. Merci pour votre réaction ! Je crois que nous sommes nombreux à réfléchir ! Donc, avec vous !

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    2. Brumaire 91, c'est bien moi qui vient de vous répondre, et non un anonyme. Bonne soirée.

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