Politique et Cartels : Coke en Stock

 Bruno Retailleau, Ministre de l’Intérieur et Gérald Darmanin, Garde des Sceaux.


Le chiffre d’affaires mondial du trafic de drogue est estimé entre 300 et 500 milliards de dollars ce qui en fait le deuxième marché de la planète après Walmart (US). Aux États-Unis, depuis 1999, le nombre de décès par overdose dépasse largement le million de personnes. En France, l’évaluation du CA est de 3 milliards d’euros, majoritairement en transit à Marseille, avec Anvers comme principale plaque tournante européenne et 12,1 milliards d’euros de CA. Ces chiffres ne sont qu’estimés pour des raisons évidentes, la sous-évaluation étant probable. Voilà pour résumer la taille du mastodonte. (cf carte Statista)



G. Darmanin et B. Retailleau respectivement Garde des Sceaux et Ministre de l’Intérieur forment un duo, pour une fois dans la 5e République, en accord quasi parfait sur les stratégies, projets et actions. C’est un début intéressant pour les attentes sécuritaires des français dans le contexte budgétaire que l’on connait. Quelles que soient nos opinions politiques, Intérieur et Justice restent les pierres angulaires de cette lutte contre ces trafics.

Les obstacles : En dehors de l’aspect massif de la tâche, ils font face à plusieurs obstacles qui ne sont pas tous directement liés au crime organisé. Le volume des trafics de drogue accompagne le volume de meurtres, et ce commerce vit dans une sorte de cohabitation étrange avec le terrorisme islamique, les mafias diverses internationales et quelques gouvernements. Certains États en ont fait une source de revenus, comme la Syrie d’Assad (avec le Captagon), le Mexique, le Surinam, la Guinée-Bissau ou l’Albanie. Les origines de production sont nombreuses (Afghanistan, Birmanie, Inde, et pour la cocaïne la Bolivie, le Pérou et la Colombie) avec des patrons de cartels disséminés jusqu’en Arabie Saoudite. L’État de Sinaloa au Mexique n’est plus le seul royaume. Cela signifie que les demandes d’extraditions pour crimes commis en France sont confrontées aux logiques financières d’États complices. Nos deux ministres font face à d’autres responsables politiques sur ce terrain-là.

Les moyens : En face de cela, nous avons un budget pour la justice deux fois inférieur à la moyenne de l’U.E. et des retards structurels dans l’organisation et les bâtiments pénitenciers. La police est en multi-combats, coincée entre le terrain et la qualité du renseignement en amont dépendant en grande partie de l’étranger. Le projet de construction de prisons de haute sécurité thématiques (100% cartels) proposé par G. Darmanin est un progrès mais c’est le travail de terrain qui reste une difficulté majeure car il y a plusieurs niveau de délits : la vente impliquant la promesse-menace sur des jeunes de quartiers, le transport impliquant une corruption de toute la chaîne, et la protection des « maîtres » impliquant un trafic d’armes, des amitiés politiques, et de nombreuses disparitions « fortuites ». En bout de chaîne, car la mort ne se rencontre pas uniquement par balles, nous avons les victimes d’overdoses et le problème national de santé publique : 1,millions de personnes consomment de la cocaïne en France, chiffre qui a doublé en presque 20 ans.

Le numérique :
Aux États-Unis, la D.E.A. ( Drug Enforcement Administration) a été spécialement créée pour lutter contre ce fléau. Mais même cette police spécialisée, et d’autant plus la nôtre en France, reste quasi impuissante pour lutter contre la progression de la demande, facilitée par l’addiction des consommateurs. Les récentes « libérations de paroles » prônées par E. Musk et M. Zuckerberg sur X et Facebook vont encourager les prises de contact distributeur-client. De plus, l’argent liquide n’est plus la seule forme d’échange. En effet l’apparition des crypto monnaies, internationales, anonymes et sans transport physique a multiplié les difficultés de traçage du renseignement des polices de tous les pays. Il n’y a pas de solution miracle car le numérique a toujours quelque temps d’avance sur le réel, et le crime organisé y est plus que présent. Les milliardaires du numérique ouvrent désormais plus grand encore la Boite de Pandore.

Un jour ou l’autre, en France, se posera la question de la légalisation du cannabis, non pour encourager la consommation de drogues douces mais pour les canaliser, et concentrer les efforts et investissements de police sur ce qui tue : la Cocaïne, l’Héroïne, le Fentanyl, l’Ecstasy-MDMA et d’autres à venir.

Beaucoup de pays l’ont déjà fait, ce qui diminue les arrestations, augmente les taxes pour l’État et spécialise les polices sur les drogues dures.

Mais cela a augmenté les accidents de la route.

Rien dans cette lutte ne sera gratuit.

Note de l’auteur

Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques, mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.

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