■ Donald Trump et Marine Le Pen (©maxPPP).
Le procès retentissant du Rassemblement National, encore en cours à la suite des réquisitions du Parquet de Paris, reflète les profits matériels potentiellement volés au budget de l’Europe, mais pas uniquement. Paradoxalement, la vision relayée par les médias ne rejoindra pas celle des électeurs du RN. En effet, il y a toujours un profit électoral à réaliser lorsque les Institutions se dressent sur la route des petits arrangements financiers ou autres dérives des partis extrémistes. Cela vaut pour l’extrême Gauche comme pour l’extrême Droite : la victimisation est porteuse de voix, contre toute vérité judiciaire. Ces partis « antisystèmes » comme ils se définissent eux-mêmes ont donc une logique particulière, présentant la possible punition financière, d’inégibilité ou même carcérale comme preuve du combat mené. Les urnes ne se remplissent pas moins et parfois plus à la suite de ces événements judiciaires pour les partis populistes.
Le meilleur exemple, impossible à ignorer, est celui de Donald Trump, pour qui l’accumulation de procédures justifiées a en fait produit l’effet d’une magnifique publicité électorale, avec les résultats écrasants que nous connaissons. Le complotisme n’a pas besoin de preuves mais de combats, même si ces derniers ne sont que le rappel de l’application de la loi face à la tricherie ou aux malversations de tous ordres. L’électeur convaincu ne retiendra que l’ignoble agression du système contre son héros politique.
Si on pousse le raisonnement jusqu’à l’univers des mafias, sans en comparer les activités, il existe pourtant des similitudes de comportement face à la Justice. Un petit malfrat du bas de l’échelle qui se fait coincer par la police et passe quelques temps en prison en ressortira grandi dans cet univers, et verra probablement une promotion arriver rapidement. C’est une sorte de syndrome de David, où on fait ses armes face à la société qui vous écrase mais dont on ressort plus fort, plus dangereux donc plus efficace. Les problèmes que rencontrent la police et la justice face aux condamnations sont de cet ordre : elles peuvent booster les maillons du crime organisé.
Les partis élus aux extrêmes politiques ne sont pas à comparer à cet univers-là mais, bizarrement, les ressorts judiciaires produisent les mêmes effets, au-delà de la peine, qu’elle soit requise ou effective. Dans le cas du RN, comme dans celui de D.Trump, il importe peu pour leur électorat que les faits reprochés soient justes ou non. Il importe de les nier, de les refuser, voire de les gommer au profit d’une vision manichéenne d’une communauté face à un système qui veut la broyer à tout prix. Les urnes en seront gavées.
Les réactions diverses du monde politique face aux réquisitions du Parquet à l’encontre du RN, et spécifiquement de M. Le Pen, sont curieuses. G. Darmanin, pourtant adversaire coriace du RN dans le Nord, considère qu’on doit battre le RN dans les urnes et non dans un tribunal. La loi étant la même pour tout le monde, cet argument n’a pas lieu d’être, sauf à considérer qu’il s’agit d’un procès politique. Que ce soit F. Fillon, J. Cahuzac, les époux Balkany ou les autres personnalités de la liste des condamnations passées, les diverses contestations n’ont pas arrêté la Justice dans son travail. Il en sera probablement de même pour le RN et les prévenus concernés.
Mais le populisme se nourrit aussi de cela.
Le RN en fera un argument, avec peut-être un autre leader qui se frotte certainement déjà les mains.
Note de l’auteur
Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques, mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.
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