■ Jordan Bardella (RN), Valérie Hayer (Renaissance), Raphaël Glucksmann (Place Publique-PS)
Par François Petitjean - Consultant et analyste de la communication politique, auteur de Adworld sur la publicité, Toxic sur les médias et Sine capita sur le numérique et l’IA aux éditions du Panthéon.
Les 8 et 9 juin prochains, les électeurs seront appelés aux urnes pour définir la composition du Parlement Européen. Cette élection a presque toujours vu la participation descendre, passant de 62% au premier scrutin (1979) à un peu moins de 50% des inscrits pour le dernier en date. La prévision 2024 n’est guère optimiste, et il suffit d’un week-end ensoleillé pour voir s’effondrer encore un peu plus ce taux de participation.
Les causes de ce demi-échec, en dehors de la météo, pourraient se résumer à deux raisons principales : l’incompréhension du rôle du Parlement Européen, de son impact sur la vie quotidienne des français, et la notoriété faible ou variable des candidats, souvent deuxième ou Nième couteau de leur parti. Mais le poids du social média dans les campagnes des candidats semble déterminer une hiérarchie d’intentions de votes assez claire. Dans ce cadre de pré-élection, et si les sondages restent à prendre avec du recul, voici l’échelle actuelle des résultats possibles, selon IPSOS :
Les causes de ce demi-échec, en dehors de la météo, pourraient se résumer à deux raisons principales : l’incompréhension du rôle du Parlement Européen, de son impact sur la vie quotidienne des français, et la notoriété faible ou variable des candidats, souvent deuxième ou Nième couteau de leur parti. Mais le poids du social média dans les campagnes des candidats semble déterminer une hiérarchie d’intentions de votes assez claire. Dans ce cadre de pré-élection, et si les sondages restent à prendre avec du recul, voici l’échelle actuelle des résultats possibles, selon IPSOS :
Dans cette hypothèse, on notera 4 catégories : la victoire annoncée, la surprise, les galères, et les logiques.
La victoire annoncée : Jordan Bardella est clairement annoncé gagnant, ce qui n’est pas obligatoirement une posture stable. En effet, il y a «écrasant » ou « gagnant » et les sondages positifs se révisent souvent à la baisse lors des scrutins. Toutefois, sa stratégie d’aparitions multiples sur les réseaux sociaux aux formats courts (Tiktok, Instagram, selfies par milliers) lui ont permis de faire passer une image de gendre idéal ou de copain de fac mais peu de fond, donc peu de critiques. C’est creux, mais d’une puissance immense : Tiktok, c’est 14,9 millions de français chaque mois, Bereal, 4,6 millions, et J. Bardella a le deuxième score de « followers » sur Instagram avec 519 000 personnes qui le suivent. Les débats à venir montreront l’absence totale de fond mais le capital d’intentions engrangé sur les réseaux restera fort. Dans une chasse simple au scrutin, sans bilan à présenter, ni discours phagocyté par une M. Le Pen silencieuse et dans une conjoncture inquiétante, c’est presque imparable. Une image, un peu de son, une tête de bon élève et le réflexe de type influenceur imprime par millions.
La surprise : Raphaël Glucksmann, représentant presque inattendu d’un parti socialiste à la dérive dans ses contradictions NUPES en France, tire son épingle du jeu au point de venir gratter aux portes des scores du parti d’E. Macron. Sa campagne a démarré avant celles des autres mais il paraît clair que sa stratégie d’exploitation des médias se révèle payante. Il est possible aussi qu’il récupère un électorat de Gauche traditionnelle lassé des errements LFI. Un peu à la manière de J. Bardella, il a investi le champ des réseaux sociaux de manière foudroyante avec un record de « followers » sur Instagram au nombre de 767 000 à ce jour. Cette stratégie tiktokienne fonctionne aussi par l’absence de bilan à défendre et une sorte de « politique washing » vis-à-vis de la NUPES, hors-jeu pour lui. Une image positive, un visage relativement plus connu que d’autres, et le plan décolle.
Les galères : V. Hayer (Renaissance) et F.X. Bellamy (LR) plafonnent sur les réseaux et sur les sondages en milieu de peloton. Respectivement 11 000 « followers » pour V. Hayer sur Instagram (absente sur TikTok), et 52 000 pour F. X. Bellamy soit 50 fois moins que Bardella pour V. Hayer, et 15 fois moins que Glucksmann pour F.X Bellamy. Ils sont sur Bereal et TikTok plus ou moins invisibles ou inaudibles mais cela pourra évoluer dans les quelques jours qui restent. On peut quand même s’étonner qu’un parti présidentiel, qui est au top de la technologie numérique dans ses approches politiques et business soit à ce point incapable de développer une stratégie de social média puissante pour sa candidate. Du côté de LR, risquant d’être battu par LFI, la chose est plus attendue, mais il semble que pour l’une et pour l’autre le simple investissement sur la notoriété et l’image ont été mis de côté. V. Hayer se retrouve donc avec une alternative entre la défaite simple ou le désastre. La reprise argumentaire du discours sur l’Europe d’E. Macron lors de « Sorbonne 2 » est insuffisant pour performer en séduction. A elle de secouer le cocotier, mais vite ! Pour ces deux candidats, on peut se demander qui les conseille, ou s’ils écoutent leurs conseils.
Les logiques : LFI (M. Aubry 8%), Reconquête (M. Maréchal 6%), Ecologistes (M. Toussaint 6,5%), et le PCF (L. Deffontaines 2%) sont les candidats de queue de peloton habituels, même si la notoriété de M. Maréchal aurait pu la faire évoluer plus haut, ainsi que M. Aubry dans une moindre mesure. Dans le cas de ces formations, la stratégie quelle qu’elle soit se heurte à leurs parrains historiques plus puissants, générant des recherches d’alliance plus que des performances pures. On peut regretter, sans prosélytisme, la faiblesse de l’intention de vote sur les Ecologistes, pourtant porteurs de la pierre angulaire de notre avenir.
Il est déraisonnable d’attendre du social média, aux formats courts mais aux audiences puissantes et participatives, qu’il développe l’explication d’un programme. Un scrutin national, surtout si les enjeux sont mal connus, se jouera sur des expressions, des sympathies, des émotions, des images simples et des mots attendus : séduire plus que convaincre. On peut le regretter, mais nous sommes dans le siècle de l’image, du bref et de l’immédiat, alors autant jouer avec cela.
Aujourd’hui, grâce ou à cause du monde virtuel, chaque électeur est un média.
En séduire un, c’est en convaincre 100.
Note de l’auteur
Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques, mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.
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