Le choix du passé

 À l'Élysée, Éric Lombard, ministre de l'Économie et des Finances, aux côtés d'Amélie de Montchalin, ministre des Comptes publics.

Par Chem Assayag - Cadre dirigeant dans l’univers du numérique, auteur (poésie et nouvelles), essayiste et blogueur (blog Neotopia).

Tout le monde a bien compris que le gouvernement navigue à vue en matière budgétaire que ce soit pour l’exécution de l’exercice 2025 ou la préparation du budget 2026. La seule boussole de François Bayrou et de ses ministres semble être la survie sans qu’aucune ligne directrice n’émerge, sans qu’aucun choix politique ne soit réalisé, à part la réaffirmation de l’objectif incantatoire de réduction des déficits.

C’est dans ce contexte que le gouvernement a acté le 26 avril des annulations de crédits à hauteur de 3,1 milliards d’euros. Dans la liste des dépenses annulées (voir la parution au Journal Officiel pour le détail) on trouve notamment 550M€ pour la mission « Écologie, développement et mobilité durables », 493M€ pour la mission « Recherche et enseignement supérieur » ou encore 95 M€ pour la mission « Enseignement scolaire ». Ces annulations font partie d’un objectif plus large de 5 milliards d’économies que la ministre chargée des Comptes Publics Amélie de Montchalin, avait justifié en expliquant : « Ces 5 milliards d’euros que nous allons soit annuler, soit repousser, soit réorienter, c’est notre réponse à un monde instable. C’est la manière de faire face quoi qu’il arrive à ce monde instable ».

On ne peut qu’être admiratif devant cet exercice de novlangue qui vise à nous expliquer que supprimer des crédits, a fortiori dans les domaines de l’écologie, de l’éducation et de l’enseignement supérieur, va nous aider à affronter un « monde instable »,. Cela témoigne surtout d’une absence totale de vision à moyen et long terme puisque justement dans ce « monde instable » la qualité de notre enseignement et de notre recherche et notre capacité à nous adapter aux défis climatiques vont constituer des enjeux majeurs et que les budgets de ces missions devraient être sanctuarisés. Cela ne dispensera pas d’un examen de ces budgets pour en améliorer l’utilisation mais on voit bien ici qu’aucun travail sérieux de ce type n’a été effectué.

En filigrane ces choix d’économies témoignent aussi d’une préférence devenue délétère pour préserver les positions acquises – on pense par exemple au tabou que constitue la contribution des retraités aux efforts budgétaires – au détriment des politiques en faveur de la jeunesse. En effet quelles seront les premières victimes de politiques restrictives en matière environnementale ou éducative ? Les jeunes.

Faisons un zoom par exemple sur le budget de l’enseignement supérieur : pour 2025 le budget du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche s’élève à 26,7 milliards d’euros. Au total, en prenant en compte les contributions aux pensions de l’Etat, les crédits de paiement atteignent 30,9 milliards d’euros en 2025, contre 31,8 milliards d’euros en 2024, soit une baisse de près de 3% et ce malgré une inflation moyenne de 2%. En outre les effectifs étaient attendus en augmentation de 1,1% entre 2024 et 2025 pour atteindre près de 3 millions d’étudiants. Au final la baisse réelle du budget par étudiant d’une année sur l’autre sera supérieure à 5% ! Quelle formidable façon de préparer l’avenir au moment où notre compétitivité économique dépend de plus en plus du capital humain de la nation !

Malheureusement si un budget reflète les choix d’une nation il est donc urgent de nous en inquiéter.

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